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Comment développer votre stratégie de maintenance ?

Ce que beaucoup d'entre nous ignorent…

Beaucoup d’entre nous ignorent l’importance de définir une stratégie de maintenance. Pour certains, ce n’est pas nécessaire parce qu’il y a en place la maintenance préventive et la maintenance corrective pour lesquelles les ressources sont déjà dédiées. Il est rare de trouver dans les entreprises une définition de la stratégie de maintenance qui va au-delà des plans de maintenance, de la planification et de l’ordonnancement. Pourtant, la maintenance tout comme les autres activités de l’entreprise se doit de définir la stratégie lui permettant d’atteindre les objectifs opérationnels et stratégiques de l’entreprise.
Définir la stratégie de maintenance suppose de définir les différentes activités de maintenance, de hiérarchiser les priorités, de décliner les démarches à suivre, d’assurer la planification des actions dans le temps, d’allouer les ressources et évaluer l’efficacité des actions mises en œuvre tout en s’alignant sur la stratégie d’entreprise.

Définir la bonne stratégie de maintenance

Une bonne stratégie de maintenance devrait permettre entre autres d’orienter les efforts dans le sens de la réalisation des objectifs de l’entreprise, de l’optimisation des ressources, de l’exploitation des atouts, la compensation des faiblesses, l’anticipation des opportunités et l’élimination des risques. Elle doit être justifiable et ses avantages et inconvénients connus.
Par principe, le choix d’une stratégie de maintenance dépend de l’analyse d’un certain nombre de critères en rapport avec la réalité de l’entreprise. Les différents critères entrant dans l’analyse prennent en compte la connaissance du comportement du matériel, l’historique de fonctionnement, les sources de données internes et externes, l’avis d’experts, les coûts de maintenances, les pannes aléatoires, etc.

Avant tout, faites un état des lieux

L’une des étapes importantes de la démarche consiste à analyser l’existant. Cette analyse faite à partir des données internes ou externes collectées permet d’apprécier le degré de maturité de vos pratiques.
Ces données sont importantes dans la mesure où leur traitement et leur analyse permettent de réunir au moins les informations suivantes :

  •  Les modes des défaillances, leurs symptômes et leurs taux ;
  •  Les causes profondes des défaillances ;
  • Le contexte de fonctionnement de chaque équipement et son interaction avec les autres équipements au sein de la chaîne de production ;
  • La fonction remplie par chaque équipement ou élément ;
  • Les conséquences des défaillances ;
  • La probabilité d’occurrence de chaque mode de défaillance ; etc.

 Le niveau de performance de la maintenance doit être apprécié également à l’aide des informations résultant du traitement des données. Les indicateurs clés du tableau de bord de pilotage, s’ils sont pertinents et non biaisés, donnent aussi un aperçu de la performance.

Qu’en est-il du leadership et de la culture organisationnelle ?

Le leadership et la culture organisationnelle sont des aspects importants dont la négligence pourrait entraver la gestion du changement dans la phase de mise en œuvre de la stratégie de maintenance. Ces aspects ne se résument pas au niveau de la maintenance mais ils concernent l’ensemble de l’organisation car il ne s’agit pas simplement de changer la manière de penser du personnel des opérations ou de la maintenance. Au contraire, l’ensemble de l’organisation doit partager une vision commune afin de la décliner en objectifs qui seront traduits à leurs tours en réalité.
La culture organisationnelle n’est favorable au changement que si les dimensions liées à l’innovation, le focus-client, la remise en cause des procédures, le benchmarking versus les best practices de l’industrie, la reconnaissance de la performance, l’acceptation de l’erreur, la flexibilité de la structure, etc. sont pris en compte dans le management au quotidien.

Les services concernés ont également leur mot à dire

Il est important d’impliquer les services concernés dans les différentes étapes aboutissant au développement de la stratégie de maintenance. Les différents services et en particulier le personnel de la maintenance ont leur mot à dire. Leur implication permet de maximiser les retours d’expérience nécessaires à la mise en œuvre efficace et efficiente de la stratégie de maintenance. Chacun de ces services à sa lecture de la réalité et peut vraiment contribuer à enrichir les informations qui permettront de décider de ce qui crée de la valeur pour l’organisation.

Il faut être méthodique

Une démarche structurée favorise l’obtention de meilleurs résultats. On peut faire appel aux méthodes d’analyse telles que Pareto, Weibull, le diagramme en bloc de fiabilité, l’arbre de défaillance, et d’autres outils statistiques de modélisation de comportement, etc. Ces méthodes peuvent aussi bien être utilisées dans l’analyse de la situation existante et de la situation future désirée. D’un autre côté, le développement de la stratégie doit également reposer sur les techniques telles que l’arbre de défaillance (Faults Tree Analysis, FTA), la maintenance basée sur la fiabilité (Reliability Centered Maintenance, RCM), l’AMDEC, l’AMDE, l’analyse des causes profondes de défaillances (root causes failure analysis, RCFA) et les techniques d’optimisation de la maintenance préventive. Le plus souvent, les entreprises font recours aux consultants pour les assister dans cette démarche.
A l’issue du développement, l’on doit être capable de justifier de bout en bout les différents choix opérés. Le choix de la maintenance corrective, réactive, proactive, conditionnelle ou préventive systématique doit clairement s’expliquer par les analyses effectuées et l’approche retenue pour le développement de la stratégie de maintenance. Concrètement, qu’est-ce que cela veut dire ?

Condition Monitoring - La surveillance d’état

Par exemple, l’utilisation de la surveillance d’état doit être déterminée par la criticité et le mode de défaillance. Ce sont ces informations qui aident à choisir la technologie de surveillance appropriée. Signalons au passage qu’il existe plusieurs techniques de surveillance d’état : d’abord nos sens. L’homme est un capteur par excellence (odorat, vue, toucher, ouïe et le goût). Grace à nos sens, nous pouvons évaluer le niveau de la vibration, la température, la pression, le déplacement, etc. Mais il existe des solutions plus fiables permettant de faire des mesures précises et des calculs complexes afin prendre facilement des décisions. On peut faire recours à l’analyse vibratoire, la thermographie infra-rouge, l’analyse d’huile, l’ultrason, etc.

La maintenance curative

La maintenance curative s’explique par le degré de criticité de l’équipement. Si l’équipement n’est pas critique et important, il vaut mieux de le laisser tomber en panne et consacrer de l’énergie aux activités de maintenance qui créent de la valeur pour l’organisation. Bien entendu, l’appréciation de la criticité et de l’importance doit se faire par rapport au contexte d’exploitation. Il peut arriver qu’un équipement moins critique dans une usine A soit l’équipement critique et important dans l’usine B.

La maintenance proactive

Si nous connaissons les causes profondes d’une défaillance et qu’il est possible de détecter leurs apparitions, nous pouvons opter pour une maintenance proactive. Le choix d’une telle stratégie permet d’agir directement sur la cause afin d’éviter l’apparition de la panne. Par contre, si c’est plutôt le mode de défaillance que nous pouvons détecter, nous pouvons adopter une approche réactive. L’intervention ne peut avoir lieu que lorsque les moyens de surveillance nous renvoient le signal concernant la défaillance.

Redesign, redondance ou/et maintenance curative.

Cependant, il ne faut pas exclure les situations ou la défaillance n’est pas cachée, la cause profonde est connue ou non mais le mode de défaillance ne peut être ni détecté et ni être prévenu. Dans une telle situation, il faut explorer la possibilité de reconception, de mise en redondance ou de la maintenance curative.

Faire de la communication la clé de voûte de la réussite

L’adhésion à la stratégie de maintenance et la réussite de la mise en œuvre nécessitent une communication efficace à l’endroit des parties prenantes. Il est claire qu’une communication inefficace ne peut engendrer que des problèmes organisationnels. Une communication efficace doit être établie dans les deux sens avec le moins de distorsion possible : l’émission et la réception. Le message doit être simple compréhensible des autres. Très souvent des ingénieurs tombent dans le piège des démonstrations techniques complexes qui ne sont pas comprises des autres. Pour éviter cela, il est préférable de traduire les différents avantages du déploiement de la stratégie en termes de bénéfices compréhensibles et perceptibles par les parties prenantes. En général, les bénéfices se déclinent sous différents aspects souvent corrélés à l’aspect économique (qu’il faut souligner).
Par exemple, si notre objectif est de prolonger la durée de vie des équipements, nous impactons positivement le CAPEX en retardant l’investissement nécessaire au renouvellement. Au bout du compte, nous améliorons le retour sur l’investissement de l’entreprise.

Ne pas perdre de vue

Le développement professionnel et la formation

Lorsqu’on accorde de l’importance à la formation, on obtient des meilleurs résultats. On crée ce que certains spécialistes appellent de la ˵valeur dérivée˶. Une attention particulière doit être portée aux connaissances, aux savoir-faire et savoir-être que le personnel doit posséder pour mettre en œuvre la stratégie. Rien ne peut s’améliorer si le personnel ne possède pas des connaissances et des compétences nécessaires pour le faire. Par ailleurs, le changement qu’entraîne une stratégie nécessite parfois la formation. Dans votre démarche de développement de la stratégie de maintenance, il est primordial d’évaluer les compétences afin de repérer celles qui nécessitent d’être renforcées. En fonction du gap entre la situation des compétences au moment de l’évaluation et celles requises par le changement, votre stratégie doit définir le plan de développement des compétences dans les différents domaines de la maintenance tels que la lubrification, les technologies de maintenance prédictive, la gestion des pièces de rechange et des consommables, la planification et l’ordonnancement, etc.

La gestion de changement

Quelle que soit notre vision ou notre objectif, nous ne pouvons opérer le changement espéré si la culture organisationnelle ne nous le permet pas. Nous avons une sorte d’inertie dans nos habitudes, dans nos manières de faire, etc. C’est notre zone de confort. Il est difficile de sortir du jour au lendemain de cette zone de confort sans mettre en œuvre une approche structurée permettant d’influencer positivement le comportement et la résistance au changement. Par exemple, passer d’une stratégie de maintenance réactive à une maintenance proactive, nécessite de convaincre les uns et les autres pour favoriser leurs adhésions. Pour influencer le changement de comportement, nous pouvons par exemple :

  • Favoriser la compréhension de la stratégie en expliquant explicitement la raison d’être du changement ;
  • Définir clairement les objectifs et les résultats attendus ;
  • Mettre en place un système de reconnaissance ;
  • Définir les rôles ;
  • Établir et standardiser les procédures et les processus ;      

D’un autre côté, pour réduire la résistance au changement, il nécessaire de promouvoir l’écoute et la communication, le développement professionnel et la formation, l’implication et la responsabilisation du personnel.   

La recette

Le rôle de la maintenance au sein d’une entreprise de production ou de services n’est pas neutre. La maintenance a la responsabilité d’anticiper les défaillances et de maintenir l’outil de production dans un état de fonctionnement spécifié. Dans cette optique, elle doit développer une stratégie c’est à dire une approche structurée permettant de répondre aux objectifs de productivité et de rentabilité. Mais cette approche n’est pas unique puisqu’elle dépend du contexte. Il faut donc partir du niveau de maturité de service actuel et peser les avantages et inconvénients de différentes stratégie afin de les adopter.

Odilon Alladoum

Odilon Alladoum

Odilon Alladoum accompagne les entreprises dans l’amélioration continue dans les domaines de la maintenance et de la production industrielle.
Il est Ingénieur Certifié de Fiabilité (CRE) et également certifié ceinture jaune en Lean et Six Sigma (YB).

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